Le portefeuille 60/40 est un portefeuille d’investissement classique composé de 60% d’actions et 40% d’obligations. Grâce à une corrélation faible ou négative entre les actions et les obligations (-0.06 depuis 2000), cette stratégie a pour but de réduire la volatilité et le risque par rapport à un portefeuille entièrement en actions.

Cette recette bien connue est recommandée par les gestionnaires depuis des années ; elle est tellement populaire aux Etats-Unis qu’il existe des indices et des ETF pour la répliquer…

Plusieurs facteurs expliquent la popularité de cette allocation de portefeuille : elle est simple à mettre en application et historiquement elle a permis d’obtenir de bons résultats. Pour un investisseur en Euro cette stratégie a offert, depuis 2000, une meilleure performance que les actions avec moins de risques.
On observe que sur cette période le meilleur couple rendement risque a été délivré par les obligations. Certaines stratégies ont réalisé performances supérieures à celles des actions, avec moins de risque ; c’est notamment le cas de la dette émergente et des stratégies Long/Short Equity.
Mais le vent a maintenant tourné. L’environnement économique actuel est moins porteur pour les obligations et celles-ci rapportent désormais trop peu pour que le portefeuille 60/40 soit vraiment efficace. La bonne performance des obligations depuis 20 ans est à mettre à l’actif du niveau des taux initiaux et de leur baisse continue. Le taux de l’indice Bloomberg Barclays Euro Aggregate est proche de 0. Son espérance de rendement est donc nulle.
En considérant le « Long Term Earning Yield » pour les actions et le rendement à maturité pour les obligations, on constate que la valorisation de l’ensemble des classes d’actifs est moins attractive que leur moyenne sur 20 ans. Cela implique que leur espérance de rendement est plus faible et leur risque plus élevé.

Portefeuille 60/40 est mort
La protection historique des obligations lors de 10 plus fortes baisses trimestrielles des actions depuis 2000 a fonctionné 9 fois sur 10. Les obligations ont en effet baissé lors du premier trimestre 2020 ! Le côté protecteur des obligations semble disparaitre lorsque les taux sont très faibles…

Comment s’adapter dans l’environnement actuel ?
Investir différemment devient une nécessité compte tenu de l’environnement de marché, de ses perspectives (de rendement et de risque) et de la difficulté voire l’impossibilité d’optimiser le couple rendement risque de façon passive ou avec une allocation flexible discrétionnaire…
Il ne faut pas investir par défaut, en appliquant le fameux « TINA, There Is No Alternative ». Lorsqu’on investit il faut toujours s’assurer que le risque que l’on prend est correctement rémunéré. La gestion du risque constitue une priorité si l’on souhaite générer de la performance…
Il faut être pragmatique, et regarder quel est le couple rendement risque attendu pour les différentes classes d’actifs. Il ne faut pas hésiter à sortir des sentiers battus. Certaines classes d’actifs et stratégies sont très peu utilisées alors qu’elles peuvent très bien rémunérer le risque ; c’est le cas de la dette émergente, des Small Caps, des stratégies Long/Short Equity, des actifs réels côtés et le crédit. Ces classes d’actifs autrefois utilisées en satellite / diversification peuvent (ou doivent) aujourd’hui devenir les cœurs des portefeuilles.
Toutefois une stratégie passive, compte tenue des valorisations actuelles, risque de délivrer à l’avenir un couple rendement risque insuffisant. Il est donc préférable de se tourner vers une approche active reposant sur deux outils :
- la multigestion qui permettra de sélectionner des fonds convexes générant de l’Alpha ;
- la gestion flexible systématique du beta via un mécanisme de Negative Deviation Target consistant à réduire son exposition quand la volatilité négative augmente et inversement.
Portefeuille 60/40 est mort
Une stratégie de portefeuille 60/40 modifiée
On pourrait par exemple conserver 60% de stratégies dynamiques avec un Negatve Deviation Target de 5% et 40% de stratégies défensives avec un Negative Deviation Target de 1%. En combinant différentes stratégies attractives avec la flexibilité du Negative Vol Target, on peut diversifier son portefeuille et reconstituer une stratégie 60/40 innovante avec des classes d’actifs encore intéressantes et prometteuses qu’on peut faire évoluer.
Voici comment l’allocation stratégique pourrait être composée aujourd’hui :

La Negative Deviation de chaque poche va définir son exposition : c’est l’allocation tactique. En Islande, on mesure l’activité sismique pour prédire les éruptions volcaniques. Sur les marchés financiers, la Negative Deviation va nous aider à anticiper les fortes corrections des classes d’actifs analysées.
Pour les classes d’actifs dynamiques, on tiendrait également compte de leur saisonnalité : leur exposition peut être de 200% maximum entre novembre et avril mais seulement de 100% maximum entre mai et octobre. Si l’exposition théorique globale dépasse les 100%, on réduit proportionnellement toutes les allocations pour revenir à 100%.
Voici la simulation de cette stratégie appliquée aux indices sur 3 ans : 4.6% de performance annualisée pour une volatilité de 3% et un Maximum Drawdown de -4.3%.

La Negative Deviation Target est un outil de contrôle des risques et de suivi de tendance qui propose la meilleure allocation d’actifs possible de façon systématique ! Il n’y a pas d’investissement par défaut et le risque du portefeuille est assez stable.
L’exposition moyenne est de 74% :

Mais cette stratégie prend tout son sens lorsqu’elle est appliquée à des fonds qui peuvent générer de l’Alpha et apporter de la convexité à la stratégie…
Article: Thierry Crovetto – TC Stratégie Financière / TC Formation / TCSF – Analyste financier indépendant spécialisé dans la sélection et la combinaison de fonds pour des investisseurs professionnels.